Comme les autres – tomes 1 à 3

Nouveauté de l’autrice Yuki NojinComme les autres est un shôjo publié par les éditions Kana. Abordant la question du handicap, cette histoire est portée par un duo de protagonistes attachants et extraordinaires. Retour sur les trois premiers tomes parus où je te donne mon avis sur cette douceur inattendue.

Tsubaki Hanakawa vient tout juste de faire son entrée au lycée. Jeune fille insouciante, sa devise est de faire ce que son cœur lui dicte, tout simplement. C’est pourquoi, lorsqu’elle fait la rencontre d’un garçon mystérieux en lui ramassant son ticket de train, elle sent quelque chose au fond d’elle : c’est le bon, c’est certain !

Coup de foudre version Tsubaki (tome 1).

Alors Tsubaki fait la seule chose qui lui est possible dans ces circonstances : retrouver la trace de ce fameux inconnu pour lui déclarer ses sentiments ! Sauf qu’elle ne sait absolument rien sur lui donc comment faire ? S’armant de patience et d’intrépidité, Tsubaki parcourt de long en large son lycée dans l’espoir de tomber sur lui. Le seul indice qu’elle dispose est un papier sur lequel l’élu de son cœur a gribouillé quelques mots de remerciements.

Mais Tsubaki a une détermination sans faille et ne recule devant rien pour réussir sa mission. C’est en discutant avec un camarade de sa classe, Ôsuke Shibasaki, que ce dernier lui donne l’identité de celui qu’il cherche : il s’agit d’Ibuki Kusano, élève de première et membre du club de photographie. Ni une ni deux, Tsubaki s’élance vers pour le retrouver !

Tsubaki : la voie du cœur

Tsubaki est amoureuse. Elle l’est d’Ibuki dès la première fois qu’elle le voit, touchée par sa gentillesse et l’aura qu’il dégage. Ingénue et spontanée, Tsubaki ne réfléchit pas aux potentielles conséquences de ses actes et fonce : c’est pour cette raison qu’elle donne une lettre d’amour à Ibuki, bien qu’ils ne se connaissent pas. Son plus grand rêve ? Qu’ils vivent une histoire d’amour qu’elle souhaite « ordinaire ».

Lettre ouverte de Tsubaki à Ibuki (tome 1).

Yuki Nojin propose une héroïne très douce, un tantinet enfantine mais surtout très attachante : Tsubaki est telle une petite fille, elle n’a pas la présence d’esprit de réfléchir en amont à ce qu’elle compte faire. Si cet aspect de sa personnalité peut gêner, voire agacer dans le premier tome, la mangaka la fait rapidement évoluer pour la rendre un peu plus posée dès le deuxième volume.

Ainsi, elle toujours aussi spontanée, mais elle part moins bille en tête et ne se déclare plus à tout bout de champ au jeune Ibuki. Je trouve d’ailleurs que Tsubaki représente réellement l’innocence pure : elle veut une histoire d’amour ordinaire et vivre heureuse avec l’être aimé sans chichis, sans difficultés. Elle est mignonne malgré ses bourdes et son insistance constantes envers Ibuki.

Spoiler alert pour Tsubaki (tome 1).

Candide, Tsubaki l’est également. Alors qu’elle échangeait des mots avec Ibuki à la bibliothèque, la jeune fille ne s’est pas rendu compte que ce dernier est malentendant. Rien ne lui a mis la puce à l’oreille et c’est Ôsuke, son camarade de classe et l’ami d’Ibuki, qui lui révèle cette vérité. Notre héroïne est étonnée, un peu bouleversée mais rien ne change pour elle : elle l’aime c’est certain, malentendant ou non. Ce que ne comprend pas Ibuki qui rejette alors jeune fille. Comment peut-elle l’aimer alors qu’il n’est pas comme les autres ?

Ibuki : spectre de la normalité

Élément central de la série, le personnage d’Ibuki est mis en avant par l’autrice dans sa narration puisque celle-ci tourne autour de lui. Adolescent complexé, Ibuki ne supporte pas le regard que ses camarades posent sur lui lorsqu’ils apprennent son handicap : c’est probablement pour cela qu’il a banni définitivement l’utilisation de son appareil auditif. Plaie profonde que l’on distingue à la surface de ses rares sourires, Ibuki ne se définit pas comme normal. C’est d’ailleurs ce qu’il répond à Tsubaki lorsqu’elle lui parle d’une histoire d’amour ordinaire : elle est impossible avec lui car il est tout sauf « ordinaire ».

Pour Ibuki c’est tout simplement impossible (tome 1).

Pourtant où se situe la normalité ? C’est cette thématique que questionne Comme les autres à travers ses personnages tous différents mais si semblables. Ibuki, ici, sort du lot du fait de son handicap auditif, mais il n’est pas présenté comme tel lors de notre lecture. Nous le voyons par le prisme de Tsubaki qui part du postulat qu’il est, finalement, comme tout le monde.

Mais malgré cela, rien ne change lorsqu’elle l’apprend : après tout, cette caractéristique ne définit pas Ibuki et elle souhaite le lui démontrer au fur et à mesure de leur rapprochement. Car finalement c’est ce qui fait de lui quelqu’un d’unique. Et puis ne sommes-nous donc pas tous différents ?

Tsubaki n’en est que plus attachante… (tome 1).

Car Tsubaki, elle aussi, pourrait être désignée comme une originale. Gravement malade depuis son enfance, la jeune fille a eu la chance de recevoir une greffe de cœur et, ainsi, sortir de l’hôpital où elle a passé de nombreuses années. Pour elle, vivre et agir selon ses envies est une revanche sur la vie qu’elle n’a pas pu mener : privée de sociabilité durant toute la période du collège, elle veut profiter à fond de son expérience au lycée.

Mais pourtant Tsubaki ne souhaite pas être perçue comme « celle ayant été malade », et ne veut pas être diminuée à cette seule réalité. Où est le spectre de la normalité dans toute cette histoire ? Ibuki et Tsubaki sont des adolescents comme tous les autres, mais sont uniques… comme tout le monde l’est.

Ôsuke : bon samaritain ou… ?

Tu l’auras compris, les deux protagonistes principaux de Comme les autres suscitent à eux seuls un grand intérêt. Pourtant, ce bon casting s’agrandit avec des personnages secondaires profonds qui apportent leur lot de thématiques complexes et matures. Ôsuke Shibasaki est le premier dont je vais parler car j’avoue avoir eu un petit coup de cœur pour lui !

Ami d’enfance et voisin d’Ibuki, il est également le camarade de classe de Tsubaki. De fait, il est en première ligne pour écouter la jeune fille geindre, à son grand dam ! Le voilà donc embarqué dans l’histoire d’amour unilatérale de celle qui devient, au fil des tomes, son amie (même s’il ne l’avouera, même sous la torture).

Background d’Ôsuke (tome 3).

Malgré tout Ôsuke est bien plus intéressant qu’il n’y paraît. On sent rapidement, dès le premier volume, que sa relation avec Ibuki est bien plus complexe qu’elle n’en a l’air : Ôsuke parle la langue des signes mais semble ennuyé de devoir communiquer avec Ibuki. Pourquoi cette animosité ? Surtout qu’il dit clairement ne pas être l’ami de son voisin alors qu’ils se côtoient…

Puis, tout devient limpide au bout de quelques chapitres. Au final, Ibuki est un véritable miroir pour Ôsuke qui ne supporte plus le regard que l’on porte sur leur relation : il est le « bon ami » qui aide « le pauvre garçon malentendant ». Insupportable. L’atout de ce personnage est de mettre le doigt sur l’ensemble du propos de l’œuvre : désigner Ibuki comme malentendant le met d’office dans une position différente alors qu’il est juste un adolescent, comme tous les autres…

Le mystère autour d’Ôsuke (tome 2).

Bon samaritain ? Ou manipulateur sentimental ? Je ne sais pas encore sur quel pied danser avec Ôsuke surtout en ce qui concerne ses sentiments amoureux… Le doute est semé à un moment dans l’histoire et, rien que pour cet élément, je continuerai ma lecture de Comme les autres. Mais aussi parce que Ôsuke apporte un vrai fond positif à cette narration d’amour somme toute classique. Déjà rien que parce que supporter la volubilité de Tsubaki est un réel exploit en soi ! Aussi parce qu’il permet au duo principal d’évoluer, de livrer leurs émotions et leurs envies. Mais surtout car son propre bonheur est en jeu et qu’il reste, même au bout de trois tomes, le personnage le plus mystérieux à mes yeux.

Hidaka : poigne de velours, gant de fer

Le deuxième personnage à faire son entrée dans la danse est celui de Nao Hidaka. Jeune fille revêche au caractère bien trempé, cette dernière fait son apparition au détour d’un couloir tout en hurlant des insanités au passage (« Va mourir » pour être précise). On révèle à Tsubaki qu’elle est une élève de première, qu’elle fait elle aussi partie du club photo (que Tsubaki a intégré pour pouvoir zieuter à sa guise Ibuki) et qu’elle se dispute très régulièrement avec son petit-ami. Et qu’elle n’a pas ce genre de personnalité agréable qui fait qu’on aime quelqu’un. Bon.

Au-delà de cette présentation peu glorieuse de Hidaka, laisse-moi te révéler pourquoi je l’apprécie – malgré tout – et pourquoi elle a sa place dans cette chronique. Déjà car Hidaka sort tout de suite du lot, elle aussi. Elle se fait directement remarquer pour sa propension à insulter tout ce qui bouge mais surtout parce qu’elle n’est pas forcément ce qu’elle souhaite montrer. L’habit ne fait pas le moine, tu le sais.

Hidaka à la sortie du club photo (tome 2).

Un jour, à la sortie organisée du club photo, la jeune fille apparaît avec un bleu au visage. On raconte à Tsubaki que cela serait son copain qui l’aurait frappée. Cette planche m’a interpellée : je ne m’attendais absolument pas à ce genre de scène dans un shôjo tel que Comme les autres. Au-delà de cet élément, Hidaka a attiré tout de suite ma sympathie et je tiens d’ailleurs à dire que toutes formes de violences sont à proscrire et qu’il ne faut jamais, ô grand jamais, hésiter à en parler. Vous n’êtes pas seules. Nous vous croyons.

Cette fille sauvage qu’est Hidaka est donc blessée elle aussi, physiquement d’ailleurs mais aussi moralement. À en croire ce que j’ai dit plus haut, elle est dans une relation toxique avec son fameux petit-copain, et porte sur elle des marques qui le prouvent. Et tout de suite, l’ensemble des personnages devant le bleu de Hidaka se le disent : elle n’est pas comme nous, elle n’est pas comme les autres…

N’est pas de fer celle qui a le cœur tendre… (tome 2).

Et pourtant rien n’est ce qu’il parait dans le shôjo de Yuki Nojin. Hidaka, ce personnage si revêche, est liée à Ibuki. Elle est son amie mais il y a également un passif entre eux qui fait l’objet d’une explication dans les trois tomes déjà publiés. Pour ne pas te spoiler davantage je ne dirais rien de plus, seulement que Hidaka montre un visage complexe.

Ce personnage est peut-être le plus représentatif de la contradiction humaine et elle n’a pas encore livré tous ses secrets – du moins je l’espère. Elle montre, paradoxalement à son comportement, une humanité touchante dans sa souffrance et dans ses peurs. J’espère qu’on en apprendra peut-être davantage sur elle, mais elle apporte véritablement un plus dans ce début de série.

Comme les autres

Globalement, j’ai tenté de développer les personnages principaux tout au long de cette chronique, et d’expliquer leur importance dans Comme les autresAlors que le titre a pour vocation d’aborder des thématiques qui les différencient entre eux (le handicap ou encore la maladie), Yuki Nojin fait surtout évoluer des adolescents qui se ressemblent, qui vivent les mêmes événements sans distinction : une sortie au club photo, les examens…

À titre personnel, le point négatif réside dans le style graphique de l’autrice. Je trouve que ses personnages se ressemblent tous, et j’ai notamment un souci avec leurs yeux. Je les trouve assez représentatifs d’un style qui se veut « shôjo classique », à savoir les protagonistes dessinés avec de grands yeux pleins d’étoiles que l’on peut retrouver dans des titres iconiques du genre. Mais cela n’entache en rien la profondeur et la douceur de cette œuvre que j’ai adoré découvrir.

Tsubaki a une volonté d’être comme les autres, de ne pas être définie par ce qu’elle a traversé. Le personnage de la jeune fille est attachant, elle apporte une fraîcheur dans cette série avec ses raisonnements farfelus et ses réflexions juvéniles. Les autres ne sont pas en reste et présentent autant de mystères que d’atoutsComme les autres a tout le potentiel pour devenir un shôjo bienveillant qu’il faudra absolument se procurer dans sa mangathèque.

Comme les autres – tomes 1 à 3
En bref
Tsubaki a une volonté d’être comme les autres, de ne pas être définie par ce qu’elle a traversé. Le personnage de la jeune fille est attachant, elle apporte une fraîcheur dans cette série avec ses raisonnements farfelus et ses réflexions juvéniles. Les autres ne sont pas en reste et présentent autant de mystères que d’atouts ! Comme les autres a tout le potentiel pour devenir un shôjo bienveillant qu’il faudra absolument se procurer dans sa mangathèque.
Scénario
8
Personnages
9
Dessins
7
Ta note0 Note
0
Point(s) positif(s)
Tsubaki et sa détermination à toute épreuve : un bol de bon humeur à consommer sans modération.
La thématique de l'handicap très bien amenée et le vécu d'Ibuki Ôsuke et son côté mystérieux.
Hidaka et son développement en quelques tomes.
L'ambiance douce qui se dégage de cette série.
Point(s) négatif(s)
Le style graphique de Yuki Nojin qui me fait penser aux classiques shôjo (mais ce n'est qu'un avis personnel).
Une trame sur fond de romance classique.
8.2
Note globale

Kitsu

Mon mantra : shôjo et chocolat 🍫

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