J’ai décidé récemment de partir à l’aventure des deux tomes de l’autrice Haru, Tokyo en avril. J’en avais entendu beaucoup de bien sur les réseaux et voulais me faire mon propre avis malgré une peur irrépressible d’être déçue. Autant dire que j’ai été transportée et incroyablement touchée par cette œuvre publiée par les éditions Hana.
Achetée samedi, j’ai lu la série Tokyo en avril une première fois tranquillement dans mon après-midi sans en attendre grand chose. J’aime les BL mais je suis souvent réfractaire à l’idée de lire des one shots car j’ai bien trop souvent que l’histoire puisse manquer de profondeur. J’ai du mal à m’imaginer être transportée dans un tourbillon d’émotions avec un seul volume ! C’est donc le format de duologie qui m’a attirée avec Tokyo en avril. Et ce n’est pas peu dire que j’ai été complètement subjuguée par cette histoire, à tel point qu’elle m’a obsédée toute la soirée après l’avoir dévoré en entier. N’y tenant plus, j’ai décidé de relire les deux tomes le dimanche pour m’imprégner davantage de l’histoire qui se joue entre les personnages…
Des personnages percutants
Une histoire somme tout banale s’ouvre dès les premières pages du manga : Kazuma, jeune homme de 25 ans environ, retourne dans la ville de Tokyo pour y travailler. Pétri de souvenirs, notre Japonais fraîchement débarqué des États-Unis, ne peut s’empêcher de penser à son premier amour qu’il a rencontré lors de son année scolaire dans la capitale.
Ren Saotome et Kazuma Takizawa se sont rencontrés en 4e année de collège à Tokyo. Très vite, une relation forte se développe entre les deux garçons qui deviennent meilleurs amis, si ce n’est plus… Pourtant, une nuit Kazuma tombe gravement malade. Hospitalisé en soins intensifs et dans le coma pendant un mois, c’est à son réveil miraculeux qu’il découvre que Ren a disparu des radars… Dix ans plus tard, le chemin de Kazuma recroise celui de Ren puisque les deux garçons se retrouvent désormais collègues au sein de la filiale tokyoïte de leur entreprise.
Kazuma Takizawa
À la suite du divorce soudain de ses parents, le jeune Kazuma se retrouve à vivre au Japon après toute une vie construite aux États-Unis. Timide et mal à l’aise devant les questions de ses camarades de classe – « Parle anglais pour voir ! » -, l’adolescent est sauvé par Ren, délégué de classe, qui lui indique que le professeur souhaite le voir. Pieux mensonge de la part de son camarade qui l’emmène alors sur le toit du collège pour faire sa connaissance et le laisser souffler. C’est ainsi que commence la belle amitié qui lie Kazuma à Ren. Très vite ce dernier, qu’il adore et vénère dans le même temps, prend une place de plus en plus importante dans sa vie.
Sauf que dix ans après son accident et son coma, Ren ne fait plus partie de la vie de Kazuma. Lors de son intégration dans sa nouvelle entreprise, le jeune homme qui vient tout juste de revenir des États-Unis aperçoit celui qu’il cherche depuis toutes ces années : Ren. Fou de joie à l’idée d’obtenir enfin les réponses à ses questions restées en suspens, Kazuma se précipite vers son ancien ami en lui demandant s’il le reconnaît. La déception est grande lorsque celui-ci se comporte de façon distante et froide avec lui. Que s’est-il passé pour en arriver à cette situation ? Et pourquoi Ren a-t-il changé de nom de famille ?
Kazuma est un bonbon, une vraie douceur. Infiniment gentil et bienveillant, il tranche dans ce monde de brutes bien représenté dans Tokyo en avril. Nous avons tous besoin d’un Kazuma dans nos vies.
Ren Saotome
Ren Saotome était un adolescent brillant selon les termes de Kazuma. D’une beauté à couper le souffle, il est très populaire et dispose d’une aura quasiment magnétique. Fils de bonne famille, il est voué à devenir médecin comme son père et son grand-père sans pour autant parler ouvertement de ses projets à ses amis, ce que déplore Kazuma lors de leur adolescence. Le personnage de Ren est vraiment très beau qu’il soit adolescent ou adulte. J’avoue être restée subjuguée devant ses grands yeux, ses traits délicats et la puissance de son regard à de nombreuses reprises. On peut pointer ici la finesse du trait de Haru qui réussit avec brio à retranscrire des émotions complexes sur le visage de ses personnages. J’adore, vraiment.
Le Ren adulte ne s’appelle plus Saotome, on le découvre en même temps que Kazuma lorsqu’il intègre l’entreprise. Il répond désormais au nom d’Ishihara. Chef d’équipe au sein d’un pôle de graphistes, il a des responsabilités importantes. Ce qu’on connaît de Ren se résume à ce que Kazuma a découvert lui-même le jour de son réveil à l’hôpital : Ren a fait son lycée en France, dans une école d’art d’où il en est ressorti diplômé. D’apparence sûr de lui, il a une position particulière parmi ses collègues car il est le seul à tenir tête à Sanadamushi aka Sanada, le chef du département RH et tyran notoire. Mais que cache sa froideur apparente ? Et quel est son secret ?
Ren est pareil à une façade. Lisse au premier abord, le personnage est extrêmement bien écrit et c’est un vrai délice de tourner les pages pour en apprendre davantage sur sa vie et les différents événements qu’il a partagés avec Kazuma.
Tokyo en avril…
Une relation poignante
La relation de Kazuma et Ren se dévoile devant nos yeux au fur et à mesure que l’on tourne les pages. Les souvenirs qu’ils entretiennent tous les deux répondent à leur vie actuelle, et permettent d’approfondir la nature de leur lien. Je suis, à titre personnel, une fervente amoureuse si je puis dire du folklore du fil rouge du destin. Le principe veut que ceux ou celles qui sont relié(e)s par ce fil rouge sont destiné(e)s à se retrouver quoi qu’il arrive.
Dans Tokyo en avril, on pourrait dire que Kazuma et Ren sont liés, eux, par un fil rouge. Ils se sont perdus de vue pendant dix ans, l’un en Europe, l’autre aux États-Unis mais pourtant ils se retrouvent, contre toutes attentes, dans la même entreprise… Le hasard ? Le destin ? Nul ne peut le dire avec certitude mais, en tout cas, il s’agit bien du point de départ inattendu de ce boy’s love signée Haru.
Plus on avance dans l’histoire, plus on comprend à quel point les deux hommes sommes liés, qu’ils en soient conscients ou non. C’est justement un point que j’ai apprécié dans ma lecture,
Une narration bien ficelée
La maîtrise de la narration dans Tokyo en avril est parfaite. L’histoire est dense avec des éléments importants, des sujets de société qui sont soulevés à mesure que les personnages évoluent, et une maturité émotionnelle se dégage à mon humble avis. J’ai vraiment adoré ma lecture rehaussée par un dessin magnifique qui ne tombe jamais dans la vulgarité. Outre deux personnages principaux qui sont au cœur de l’histoire, d’autres personnages gravitent autour d’eux et sont développés, ce qui est un point fort dans cette série constituée seulement de deux tomes !
La vision de la société est assez bien dépeinte avec une représentation de l’entreprise qui peut s’avérer juste : le fait d’être employé et d’avoir un supérieur, de faire face à du harcèlement moral, de protéger sa vie privée… L’écriture de Haru est fluide, et les différentes périodes s’entremêlent naturellement : l’on passe de la période du collège des deux garçons à leur vie d’employés avec agilité et les passages se répondent les uns aux autres tout au long de la série. Cette narration riche fait également écho aux points de vue différents que l’on suit tout au long du manga : celui de Kazuma, celui de Ren, celui de Yagami, un ami de Ren qu’il connaît depuis sa scolarité en France, mais aussi celui de la mère de Kazuma… Le tout s’imbriquant tel un puzzle pour donner les clés de compréhension au lectorat. Pour résumer, Tokyo en avril est un ouvrage complet, foisonnant et complexe.
Un lien indéfectible
Que deviennent nos liens une fois que nous ne voyions plus les personnes qui ont compté pour nous ? Sont-ils aussi forts même au bout de dix ans ? Ou se flétrissent-ils ? Même si nous quittons quelqu’un en mauvais terme, de quoi se teinte l’intensité de notre lien avec cette personne ? Tokyo en avril permet d’aborder cette question sous l’angle de la relation de Ren et Kazuma qui se retrouvent après dix ans de séparation sans avoir aucune nouvelle l’un de l’autre.
Pour conclure, un boy’s love que j’ai trouvé juste exceptionnel. Je n’avais pas ressenti autant d’émotions fortes depuis ma lecture de Let’s be together que j’avais adoré. Il s’agit pour moi d’un très bon manga avec une histoire qui vaut la peine d’être lue.