Disponible aux éditions Meian depuis mai dernier, The One est un manhua que je n’attendais plus ! J’espérais toutefois secrètement sa sortie en français… Connaissant déjà l’histoire et son déroulement, c’est donc en terrain conquis que j’entame cette deuxième lecture de la série. Le moins que l’on puisse dire c’est que ces deux premiers tomes m’ont ravie. À nouveau.
La jeune Lele Teng vit chez sa grand-mère maternelle suite au décès de ses deux parents, travaillant dans le domaine de la mode. Elle admire cependant le bel Angus Lanson, un top model à la beauté ensorcelante.
Alors qu’elle a toujours été réticente à devenir mannequin, elle accepte finalement l’offre de sa tante, directrice d’agence. La voilà désormais plongée dans cet univers impitoyable où la concurrence est très rude. Comment s’en sortira-t-elle ? Suivra-t-elle les traces de sa défunte mère ?
Plongée dans l’univers de la mode
À l’instar de Nana (2000) et Skip beat (2008), grands shôjo datant de la même époque, The One est une série qui s’intéresse à un domaine particulier, la mode plus précisément, pour nous en montrer les paillettes et ses dessous beaucoup moins reluisants, une fois le vernis retiré.
Bien sûr, le diktat de la maigreur – érigé en principe à cette période – ne nous est pas inconnu. Mais il y a d’autres aspects que l’autrice ne manque pas d’aborder… Ces deux premiers tomes étant introductifs, nous n’en découvrons qu’une rapide partie : castings, séances photo, relations avec les professionnels (directeurs artistiques, photographes, etc.) principalement. L’autrice n’édulcore pas son propos ni ne le noircit. Elle présente les choses, telles qu’elles sont, et surtout telles que Lele les vit.
Pour nous y introduire le plus naturellement possible, l’autrice utilise cette jeune lycéenne qui va s’essayer au mannequinat. Complète débutante, elle baigne pourtant dans le milieu de la mode depuis sa plus tendre enfance. En effet, sa mère était une top model qui a réussi à se hisser au sommet, avant de disparaître tragiquement avec son mari. Et sa tante, qui dirige une agence de mannequins, ne cessait de la convaincre de s’y mettre et adorait lui faire prendre la pose.
Pour Lele, la mode est un univers superficiel dans lequel il suffit de sourire devant les photographes tout en portant de beaux vêtements. C’est notamment la raison pour laquelle sa première expérience est un véritable fiasco. Elle arrive non préparée à sa séance photo, sans avoir la moindre information sur ce qu’elle doit faire ni la marque qu’elle promeut… Forcément, ça ne peut pas aller.
Elle prend alors durement conscience, qu’il va falloir cravacher pour arriver, elle aussi, au sommet de la gloire. Elle devra fournir des efforts et sortir de sa zone de confort. Or la célébrité étant fugace, il lui faut penser à savoir perdurer car une tendance finit toujours par en chasser une autre.
Lele : entre chasse au BG et quête existentielle
Même si le manga a commencé après, j’ai l’impression de lire Skip beat d’une certaine façon. Les héroïnes intègrent un univers non pas par conviction mais pour nourrir un autre dessein. Kyôko cherche à se venger, Lele à se rapprocher d’Angus.
De prime abord, notre héroïne ressemble à une jeune fille un peu trop pleurnicheuse, qui cède vite à la panique. Cela ne la rend pas moins attachante pour autant. Il faut rappeler qu’elle n’a que 16 ans, sa personnalité est donc en pleine construction. J’apprécie de la voir tour à tour hésiter, se tromper pour en ressortir plus forte et confiante. Cette histoire est là aussi pour montrer sa progression autant dans la voie qu’elle a fini par emprunter que dans son psychisme.
Elle vit choyée par sa grand-mère et sa tante, nourrissant une relation fusionnelle avec la première. C’est donc dans une certaine bienveillance et un milieu rassurant que notre héroïne a pu grandir et s’épanouir.
Malgré tout, l’absence de ses parents, surtout sa mère se fait sentir à certains moments. C’est peut-être la véritable raison pour laquelle elle finit par accepter de devenir mannequin. Bien sûr, elle n’est pas contre l’idée se lier avec le bel Angus… Toutefois, comprendre sa défunte mère à travers la profession qu’elle a exercée est très important. C’est une façon pour la demoiselle de mieux la connaître, l’espace d’un instant.
Un début au ton léger, mais le drame n’est jamais bien loin
Le ton de ces deux premiers tomes se veut résolument léger. Le comique y prend une place prépondérante, notamment grâce à la maladresse de notre héroïne. On a mal pour elle. En revanche, ses gadins sont monumentaux et ont lieu aux pires moments !
Du reste, l’autrice n’hésite pas à user de déformations en tout genre, notamment en faisant pulluler ça et là des personnages SD (Super Deformed : soit une grosse tête caricaturée sur un tout petit corps) pour accentuer cet effet. De même, leurs visages ont des expressions ultra exagérées. Cela concourt à nous faire davantage rire. Bien entendu, série des années 2000 oblige, ce procédé paraît à notre époque relativement daté. Cependant, je le trouve encore très efficace ! Suis-je bon public ? Tout à fait ! Et c’est peut-être pour ça que ça marche sur moi.
Toutefois, le drame et les péripéties moins joyeuses pour certains de nos protagonistes montrent vite le bout de leur nez, incarnés en les personnes d’Angus et Eros.
Si Lele s’apparente à la beauté solaire, Angus et son frère jumeau, Eros représentent plutôt la Lune avec son charme magnétique…
À la manière du satellite de notre planète, Angus serait la face visible : en tant que mannequin, c’est lui que l’on voit sous le feu des projecteurs. Bon vivant en apparence, il apprécie tout type de plaisirs, des plus charnels aux plus artificiels. Son comportement est extrême, dans ce que l’on appelle une sorte de brother complex. Il montre à plusieurs reprises qu’il adore son frère, c’est même plus que ça. Il s’agit même d’une véritable obsession. Leur relation est d’ailleurs nébuleuse et une aura sombre plane au-dessus d’eux.
Eros, de son côté, apparaît comme la face cachée de la Lune, occupant un métier de l’ombre : directeur artistique. Il préfère ne pas se montrer aux yeux du public, afin de rester à l’écart du showbiz et ses vices.
Se faire passer pour un vagabond est son passe-temps. C’est même sous cette couverture qu’il se présente pour la première fois à Lele, en tant que Yin. Comme elle ne connaît pas sa véritable identité, cela donne parfois des situations cocasses ainsi que des moments plus émouvants. Elle éprouve de la peine pour ce sans-abri, propre mais orphelin.
On comprend dès lors que toute la tension dramatique va se dérouler autour de ce trio, accompagné bien entendu de différents personnages. La thématique du brother complex, le passé douloureux que l’on devine pour ces deux frères ou bien la romance naissante à coups de rencontres impromptues témoignent d’une certaine époque dans les clichés shojoesques. De mon côté, cela ne me dérange pas, l’essentiel étant que l’autrice réussisse à leur donner matière et bien les développer. J’ai mon idée sur la question de manière globale, bien que je demande à être à nouveau emportée par le récit.