La Semaine du shôjo 2024 est lancée ! Aujourd’hui, on pousse cap sur l’univers des drama shôjosei, catégorie thrillers et séries qui bousculent les consciences…
On aime encore penser que shôjo = romance. On trouve effectivement pléthore de shôjo romantiques, et c’est très bien. Pas question ici d’opposer les shôjo romantiques aux shôjo d’action, d’horreur, de suspense ou de sport. Au contraire : au Club shôjo, on cherche à mettre en valeur la diversité des shôjosei, pour tordre le cou au idées reçues.
Les sites de VOD proposent de plus en plus de drama adaptés de shôjo, notamment des comédies romantiques : Turn to me Mukai-kun, Sawako, Blue spring ride, The Full-Time Wife Escapist, From 5 to 9, Summer time… Impossible de ne pas citer le très populaire Hana yori dango. Tous ces drama sont disponibles sur Viki ou Netflix.
La planète drama shôjosei est si grande qu’il nous fallait faire un choix. On a choisi de braquer l’objectif sur des œuvres qui sortent de la romance. Elles sont peut-être moins mises en avant que les titres romantiques, ou, du moins, sont peut-être moins connues du grand public. On espère que cette mini sélection te plaira, et te donnera envie de découvrir ces drama shôjo (si ce n’est pas déjà fait !)
Don’t call it mystery
À la base, Don’t call it mystery (Mystery to Iunakare) est un josei manga de Yumi Tamura. Prépublié dans Flowers et édité par la Shôgakukan en 2017, le manga est toujours en cours, avec 13 tomes sortis. Le manga sort en France en 2021 chez Noeve Grafx (7 tomes parus). L’adaptation drama est diffusée sur Fuji TV durant l’hiver 2022. 12 épisodes de suspense qui nous tiennent en haleine. Un film sort un an plus tard (en septembre 2023) au cinéma. La série est disponible gratuitement sur Viki.
Tomoko Aizawa (Brainstorm’ Seduction, Yamato Nadeshiko…) signe le scénario du drama. À la réalisation, un quatuor : Hiroaki Matsuyama, Hideyuki Aizawa, Hiroyuki Abe et Shunsuke Shinada. Les musiques sont l’oeuvre du célèbre Ken Arai.
Si tu connais les célèbres Basara et 7SEEDS, tu connais certainement Yumi Tamura. L’autrice est connue pour plonger ses héroïnes et héros dans des univers chaotiques, où l’expression « lutter pour sa survie » prend tout son sens. Ces univers hostiles sont une excellente base pour fouiller la psychologie de ses personnages.
Mystère, vous avez dit mystère…
Il est justement question de psychologie des personnages dans Don’t call it mystery. Totonou Kuno (incarné par Masaki Suda) est un étudiant comme tant d’autres. Grand amateur de curry, il prépare justement son mets préféré lorsqu’il est dérangé par la police. La suite de l’histoire se passe au commissariat… Totonou est accusé de meurtre. Il en est le premier surpris. Voyant que tout l’accuse, il décide de prouver lui-même son innocence. Mission impossible ? Pas pour Totonou, qui, sous ses airs de jeune homme lunaire, cache un sens aigu de l’analyse…
Don’t call it mystery est une excellente série policière. Chaque épisode est finement orchestré. Totonou a le chic pour tomber dans les problèmes… à moins que ce ne soient les problèmes qui lui courent après. La police aussi lui court après, alors que notre étudiant ne cherche qu’une chose : pouvoir enfin savourer son curry !
Burn the house down / Famille en flammes
Burn the house down (Mitarai-ke, Enjou suru) a fait fort, avec une sortie quasi simultanée du manga (chez Akata) et du drama (sur Netflix) durant l’été 2023. L’œuvre d’origine est signée Moyashi Fujisawa. Le josei sort en 2017 au Japon, dans le magazine de prépublication Kiss de la Kodansha. La série est terminée au Japon en 8 tomes. En France, elle est toujours en cours, avec 5 tomes parus.
Le drama compte 8 épisodes qui nous plongent dans un huis clos inquiétant. On ressent très vite toute la pression qui pèse sur Anzu, l’héroïne. Le scénario est confié à Kaneko Arisa. Elle a travaillé sur de nombreux drama à succès dont Sore wa, totsuzen, arashi no yô ni, Sapuri, Papadoru, Densha otoko… Yuichiro Hirakawa et Koji Shintoku s’occupent de la réalisation. Le célèbre Takeshi Kobayashi signe les musiques. Tu le connais peut-être pour sa collaboration avec Jin, l’ex-chanteur des KAT-TUN, à l’occasion de la sortie du film BANDAGE (en 2010).
Seule contre tous
Le début du drama plante tout de suite le décor. Anzu (interprétée par Mei Nagano) est seule contre tous. Elle reste pourtant déterminée à faire éclater la vérité, et à venger sa mère, accusée à tort d’avoir incendié la maison familiale. Le drama montre bien le gouffre dans lequel cet accident a plongé la famille. Mais faut-il parler d’accident ? Anzu en est certaine : tout a été orchestré pour détruire sa famille.
Si la série pèche parfois par excès de naïveté et tire de grosses ficelles, elle puise sa force dans un certain réalisme. Dans les thrillers, on présente parfois des personnages dotés de capacités quasi surnaturelles (intelligence hors du commun, sens de la déduction extraordinaire). Anzu est consciente de ses limites. Pourquoi se borner à agir seule, quand on peut compter sur l’aide des autres ? En ce sens, l’histoire nous apprend aussi l’humilité.
Rouge éclipse / Switched
Rouge éclipse (Sora wo Kakeru Yodaka), est, à la base, un manga de Shiki Kawabata prépublié en 2014 chez Betsuma (Shueisha). Le shôjo sort en 2016 chez Akata. La série, finie en 3 tomes, donne lieu à un drama de 6 épisodes diffusé durant l’été 2018, sur Netflix. Côté production, on retrouve le scénariste Michinao Okada (Liar Game), le réalisateur Hiroaki Matsuyama (Liar Game, Don’t call it mystery le film…), et le compositeur Ken Arai.
Rouge éclipse n’est pas une histoire facile. La série parle de harcèlement scolaire, de suicide… Comment ne pas compatir face à ce que subit Zenko (incarnée par Miu Tomita) ? Le drama montre bien la différence entre le monde ordinaire d’une adolescente (représenté par la populaire Ayumi, jouée par Kaya Kiyohara), et l’horreur quotidienne subie par Zenko. Et si l’on pouvait tout changer ? C’est ici que la série bascule légèrement dans le paranormal. À partir de là, tous les repères changent, pour mieux nous interroger.
Les acteurs sont touchants et convaincants. Dommage que les rôles masculins prennent l’avantage dès que les discussions deviennent un poil scientifiques ou techniques. Le côté surnaturel semble même prendre le pas sur le côté psychologique, laissant des questions en suspens. J’ai aussi trouvé ce « problème » en lisant le manga Ce printemps rémanent, de la même autrice. Hormis ce bémol, le drama Rouge éclipse reste convaincant. Il nous appelle à nous interroger sur notre rapport à l’autre, à nous-mêmes. Sommes-nous si honnêtes et gentils que nous voudrions le prétendre ?
La grossesse de M.Hiyama
On termine cette sélection drama par La grossesse de M. Hiyama. À la base, un josei manga d’Eri Sakai (Hiyama Kentarou no Ninshin) prépublié en 2012 chez Be Love, de la Kodansha. En France, le one-shot est sorti en 2023, chez Akata. Le drama sort sur Netflix en 2022. Les 8 épisodes sont réalisés par Yuko Hakota et Takeo Kikuchi, avec le trio Chihiro Amano, Yoshihatsu Yamada et Yukiko Sode au scénario. Trio de compositeurs aussi côté musiques, avec Masaki Hayashi, Eager Lush et Yusuke Orita.
Eri Sakai, habituée à traiter de sujets de société, nous interpelle avec son one shot. Au Japon, à l’époque comme aujourd’hui, on demande aux femmes de subir le patriarcat en silence ou presque. Elles se doivent d’être travailleuses, mères et épouses modèles. C’est justement pour bousculer les codes que la mangaka crée une série où les hommes peuvent tomber enceints. Le drama Netflix donne un second souffle à la série, et internationalise le débat.
Briser le plafond de verre
J’ai trouvé ce drama déroutant à plus d’un titre. Tout d’abord, voir un homme enceint (Kentaro Hiyama, interprété par Takumi Saitô) m’a beaucoup perturbée. Bien sûr, la question n’est pas tant de permettre aux hommes de tomber enceints que de garantir une véritable égalité de droits entre les femmes et les hommes. Si le travail des femmes était reconnu, y compris celui des mères au foyer, tout irait mieux. Le drama dénonce justement les discriminations faites aux femmes : double journée de travail, charge mentale, plafond de verre, précarisation, la pression de la famille, de la société…
La crise démographique est devenue quasi mondiale : France, Croatie, Italie, Japon, Maroc, Corée du Sud, Chine, États-Unis, Finlande, Norvège, Brésil… Les États pressent les femmes de faire des enfants, sortent le carnet de chèque, parlent de « réarmement démographique »… mais ne font pas encore assez pour lutter contre le sexisme et les discriminations touchant les femmes.
Le drama montre d’ailleurs bien cette injustice. Hiyama la découvre alors qu’il tombe enceint. Tout est compliqué. Toutes les portes se ferment. Il est contraint de médiatiser son histoire pour faire bouger les lignes. Pour pouvoir vivre, tout simplement.
J’espère que tu as apprécié cette petite sélection. Comme je le disais en intro, il existe bien entendu de nombreuses autres adaptations drama de shôjosei. Les anime et drama peuvent être une belle porte d’entrée pour découvrir ou redécouvrir un manga. Quels sont tes drama shojosei préférés ? Quels titres aimerais-tu voir licenciés ?