Je ne pouvais pas finir ce mois consacré à Vampire Knight sans évoquer le personnage de Hanabusa Aidô. En lisant l’ensemble de l’histoire, j’ai été surprise par l’admiration, voire la vénération, sans faille, qu’il porte à Kaname. Malgré tout, au gré des événements et des actions immorales de l’héritier Kuran, la foi incontestable de Hanabusa se fêle à plusieurs reprises, plongeant le vampire en plein doute et remise en question. Mais finalement… est-ce que ces instants très courts ne constituent-ils pas le terreau de son émancipation ?
Avertissement : je n’ai pas encore lu Vampire Knight Memories et je ne prétends pas parler pour Matsuri Hino. Cet article est tiré de ma réflexion et de ma sensibilité.
Disclaimer : l’article révèle des éléments du manga qui constituent des spoilers.
Héritier d’une famille aristocratique de vampires, Hanabusa n’est entouré que de sœurs et d’un père aimants. Cajolé et mis en avant depuis son enfance, il est souvent accompagné par son cousin Akatsuki Kain qui joue le rôle de de garde-fou au vu des nombreuses bêtises de Hanabusa.
Surnommé « Idole-senpai » au sein de l’académie Cross, c’est un personnage solaire, débonnaire et indolent qui symbolise d’une certaine manière la naïveté enfantine.
Fusion enfantine et amour inconditionnel
Son innocence se cristallise dans son apparence : tête blonde, yeux bleus d’ingénu, sourire gourmand, Hanabusa apporte une légèreté au début du manga. Archétype de l’enfant, il est ouvertement immature, enchaînant les bourdes sans pour autant faire amende honorable ou apprendre de ses erreurs.
Pour lui, ce n’est pas important de faire attention à sa nature de vampire et s’en amuse même devant les jeunes filles de la Day Class qui lui vouent une réelle admiration du fait de sa beauté et de son charme. Il fait des allusions à certaines et montre ses canines à d’autres, n’en faisant qu’à sa tête sans avoir cure de ce qu’il pourrait se passer. À quoi bon se soucier du lendemain lorsqu’on est un jeune vampire sans responsabilités ?
Personne ne semble pouvoir arrêter Hanabusa dans ses bêtises, pas même son cousin Kain qui le côtoie depuis toujours et le connaît bien. Pourtant, il existe bien quelqu’un qui a le pouvoir de le canaliser : Kaname Kuran, le vampire de sang-pur. Hanabusa fait preuve d’une loyauté sans faille et d’un amour incommensurable envers lui.
Très souvent réprimandé par l’hériter Kuran, il ne s’offusque jamais et accepte les punitions sans broncher, tel un enfant devant sa figure d’autorité. Car il sait qu’il a fauté, qu’il est allé trop loin, mais malgré tout cela ne l’empêchera pas de recommencer.
La punition du sceau pour un sot.
Ce quasi-fanatisme pose problème dans l’évolution de Hanabusa : toujours derrière Kaname, le jeune vampire ne le remettant jamais en question. Pour preuve, Hanabusa prend très à cœur de défendre le nom de Kaname, leader et créateur de la Night Class, lorsqu’on lui manque de respect, notamment Zero.
S’il est enfant, on peut comparer Kaname à une seconde figure paternelle pour Hanabusa. En effet, Kaname possède ce rôle de guide auprès du jeune homme, en lui mettant notamment des limites à ses actes : on retrouve ici cette idée d’enfant qui, pour grandir, a besoin d’apprendre à s’entendre dire non et à l’accepter.
Au-delà de cette question, Hanabusa a la foi. Il croit dur comme fer, sans faiblir, en l’hériter Kuran et ses paroles, ne réfléchissant presque pas par lui-même. Si Kaname le dit c’est que c’est vrai, non ?
Pour Hanabusa, tout est justifié lorsqu’il faut défendre Kaname et, comme un enfant, Hanabusa agit sans prendre en considération les conséquences possibles.
Premières fissures
Je pensais initialement que cette croyance pour Kaname allait ralentir Hanabusa dans son évolution. Comment pourrait-il s’émanciper de cette vénération abusive ? Lui est-il possible de prendre conscience de sa propre existence sans être le témoignage vivant de celle de Kaname ?
Le premier moment décisif pour Hanabusa arrive après le meurtre de Shizuka Hiô, la princesse de sang-pur tuée au sein de l’académie Cross. La Night Class est en effervescence depuis cet événement et tout porte à croire que le responsable est le hunter Zero Kiryû.
L’acte est odieux puisqu’il est tabou de porter atteinte à un vampire de sang-pur, ces êtres divinisés par la communauté. Quiconque en est à l’origine doit être condamné et le payer de sa propre vie.
Pourtant, l’affaire est vite étouffée et Zero délaissé par le Sénat puisque Kaname a pris sa défense publiquement. L’ordre de la société vampirique reste en sursis et Hanabusa souhaite découvrir la vérité quant à ce meurtre : que s’est-il passé ? Et pourquoi Kaname met-il en péril sa réputation pour sauver un simple humain ?
Comme explicité plus haut, Hanabusa est un enfant et il en éprouve la jalousie : il veut une relation exclusive et ne supporte pas que Kaname s’occupe de quelqu’un d’autre, surtout s’il est humain.
Pourquoi pas moi ?
Alors quand le meurtre de Shizuka est inexplicable, Hanabusa émet ses premiers doutes envers ce Kaname qu’il pensait parfait. Et quelle solution trouve-t-il pour ne pas affronter ses suspicions ?
Il fugue.
À mon sens, le terme de fugue est fort et démontre cette mentalité propre à Hanabusa, telle une crise d’adolescence qu’il fait sur le tard. Il trouve refuge auprès de Zero et Yûki clamant haut et fort qu’il ne souhaite pas rentrer dans le pavillon et que rien ne le fera changer d’avis. Comme un enfant, il faut qu’il se fasse entendre et veut avoir le dernier mot. L’hypothèse d’affronter Kaname alors qu’il ne sait plus quoi penser ne le met pas à l’aise et il préfère fuir. Que faire quand son monde s’écroule ?
« J’ai fugué du pavillon ! »
Par la suite, il tente de dénicher la vérité auprès de l’hériter Kuran lui-même puisque, pour Hanabusa, il possède un lien particulier avec lui.
Se remémorant leur première rencontre, Hanabusa se souvient de ce sentiment si particulier qu’il avait ressenti : lui qui se sentait supérieur en tout point, car on le lui avait répété pendant ses jeunes années, rencontre un être supérieur à lui qui va le fasciner.
Toujours près de lui depuis, Hanabusa souhaite être le centre du monde de Kaname. Il cherche la fusion avec l’être aimé, tel un enfant. Et devant ses camarades qui lui reprochent ces réactions infantiles envers Kaname lorsque celui-ci ne veut pas lui parler du meurtre de Shizuka, il se rend à l’évidence : non, il n’a pas grandi depuis cette rencontre.
Introspection à lueur de la lune.
Apprendre à s’émanciper
C’est à partir de ces premières fêlures dans sa représentation de Kaname que Hanabusa prend enfin conscience qu’il lui faut avancer. Il semble devenir plus posé, moins réactif à l’existence de Kaname.
Plus le temps avance, plus il s’affirme en tant qu’individu, même si Kaname n’est jamais loin. Il devient le précepteur de Yûki lorsqu’elle est au manoir Kuran, apprend à la connaître et à la respecter.
Malgré tout, son émancipation va arriver un peu plus tard et va lui permettre de se libérer de cette admiration quasiment toxique qu’il voue à Kaname. Ainsi, nourrissant déjà ses objectifs de vengeance, Kaname rend visite au père du jeune homme, Nagamichi Aidô, et le tue sous les yeux de son fils et de Yûki.
Électrochoc impensable.
Hanabusa s’effondre. Cette figure d’autorité qui était le centre de sa vie vient de le trahir en mettant fin à la vie de son père, sans aucune explication. Comment se relever ? Comment donner raison à Kaname ? Que faut-il penser ? Est-ce cela être adulte ?
Cet acte marque le passage à l’âge adulte de Hanabusa. En une seconde, il perd deux personnes essentielles à son développement personnel : son père aimant et son ami qui conditionnait sa vie du fait de son existence.
Fini de se cacher, fini de ne pas décider par lui-même. Enfermé dans le QG des hunters, le jeune vampire est perdu : son univers est désintégré et ses sentiments sont entremêlés.
Lorsque Zero vient le voir, lui-même rempli de haine pour les Kuran, Hanabusa prend sa première décision d’adulte, sa première décision à lui : non, il ne tombera pas dans la haine. Et il veut garder la foi. Se rapprochant par la suite de Yûki, il placera toute sa loyauté en elle, entamant son émancipation loin de la présence de Kaname.
Ne pas céder à une haine tentatrice.
Cette volonté de toujours croire caractérise le personnage de Hanabusa qui place sa foi et sa loyauté dans les membres de la famille Kuran, les princes de sang-pur qu’on lui a appris à respecter.
Peut-être symbolise-t-il cet apprentissage douloureux de la vie ? Celle d’un jour quitter un giron réconfortant sans soucis pour déployer ses ailes et assumer pleinement ce que l’on souhaite devenir, libéré de ses chaînes.