Lorsque l’on évoque Vampire Knight, comment ne pas penser à Zero Kiryû, personnage principal masculin du shôjo écrit par Matsuri Hino. Confident de Yûki, il partage avec elle une relation particulière teintée de nostalgie et de doutes… Entre histoires familiales et conflits avec les vampires, l’existence de Zero est mouvementée, lui faisant vivre des trahisons terribles qui l’empêchent d’avancer. Pourtant, en découvrant un personnage sur le chemin du pardon à la fin de l’histoire, je me suis demandée : Zero n’était-il pas finalement un personnage résilient et incroyablement aimant ? Lui permettant de se relever et de pardonner ?
Avertissement : je n’ai pas encore lu Vampire Knight Memories et je ne prétends pas parler pour Matsuri Hino. Cet article est tiré de ma réflexion et de ma sensibilité.
Disclaimer : l’article révèle des éléments du manga qui constituent des spoilers.
Comme tu le sais sans doute, Zero vient d’une famille réputée de vampire hunters, les Kiryû. Ces derniers ont pour mission de surveiller la communauté vampirique et d’éliminer les individus signalés comme ayant dégénéré au Level E. Pour rappel, les Level E sont d’anciens humains transformés en vampire qui finissent leur vie assoiffés de sang perpétrant des meurtres pour se rassasier.
Alors que tout se passe bien dans l’enfance de Zero, un événement inattendu bouleverse son existence : le massacre de sa famille par une vampiresse au sang-pur, Shizuka Hiô.
Shizuka Hiô après avoir tué les parents de Zero.
Cette dernière explique son geste à Zero qu’elle épargne : tout est la faute de ses parents bien-aimés qui ont pris la vie de son amant, un ancien humain devenu vampire qui n’avait pourtant pas évolué au Level E. Devant cette injustice, Shizuka n’avait donc que l’obligation de se venger puisque plus rien n’avait de sens désormais.
Cette action détermine et conditionne l’existence de Zero. L’impact négatif est tel qu’il emprunte depuis ce jour le chemin de la haine. Son unique objectif de vie sera de la retrouver puis de la tuer, quoi qu’il en soit.
Tenter de survivre
Zero est donc un jeune garçon torturé dès le commencement du manga. Recueilli par le directeur Cross dès l’âge de dix ans, il peine à s’ouvrir à son entourage d’adoption et n’exprime pas ses émotions. Comment trouver des mots assez forts pour décrire l’horreur qu’il a vécu ? Quelle direction prendre lorsqu’on a perdu tous ses points de repères ?
Au fil du temps et par peur de perdre le contrôle de lui-même, Zero préfère éviter les contacts et fuit dès que l’occasion se présente. Cette dynamique comportementale lui donne l’impression de réussir à maintenir de côté sa nouvelle nature de vampire qui s’intensifie.
En effet, comme nous l’apprenons très rapidement, Zero a été mordu cette fameuse nuit par Shizuka Hiô ce qui, de fait, a entamé sa lente transformation en vampire. Depuis, son identité naissance ne cesse de hanter ses pas et Zero n’arrive tout simplement pas à accepter cette réalité.
Zero lutte contre sa soif.
Il devient progressivement ce qu’il hait le plus au monde : un vampire, une créature de la nuit, prédatrice dans la société humaine. Difficile alors pour le jeune homme de trouver la paix intérieure puisqu’il est, de surcroît, toujours en proie à cette ambivalence qui le pousse à rejeter les autres.
S’enfonçant dans ce dégoût de lui-même, Zero découvre avec souffrance que son corps ne supporte pas les blood tablets, ces comprimés de sang synthétiques mis au point par les élèves de la Night Class.
La faim le tenaillant constamment, il lutte avec courage pour éviter de sombrer. Sauf que le lycéen est obligé d’y céder à un moment et ne peut pouvant plus résister, il, plante ainsi ses crocs dans le cou de Yûki pour apaiser autant sa soif que ses tourments.
C’est ainsi que commence une relation compliquée de nos deux protagonistes. Yûki ne peut pas se résoudre à laisser Zero souffrir dans son coin et lui propose alors de boire régulièrement son sang.
Leur relation qui était déjà conflictuelle bascule dans l’ambiguïté : Zero ne peut plus se passer du sang de Yûki, conscient de ce qu’il est en train de devenir, encaissant les mises en garde régulières de Kaname concernant le bien-être de Yûki. Comment peut-il boire autant de sang la laissant presque en anémie ?
Yûki accepte de donner son sang à Zero.
Tandis que Yûki plonge progressivement dans un état nostalgique et dans une résurgence de découvrir qui elle est réellement, Zero peine de s’accepter tel qu’il est.
Le jeune homme traverse aussi de son côté une crise identitaire profonde. On le perçoit souvent le regard posé sur le pansement de Yûki qui recouvre ses morsures répétées : comment être en paix avec soi-même lorsqu’on devient comme le monstre qu’on s’est juré de détruire ?
Pardonner l’impensable
De fait, Zero est pour moi, un personnage qui vit avec un profond sentiment de culpabilité : celle du survivant, celui qui a été épargné sans qu’il ne comprenne pourquoi. En effet, la disparition de ses parents entraîne également celle de son frère jumeau Ichiru, frère qu’il adore.
Le manga nous permet d’explorer succinctement cette relation gémellaire qui lie les deux frères hunters, et met en avant, à mon sens, la douleur de Zero d’avoir perdu son petit frère qu’il avait pour devoir de protéger, puisque Ichiru était frêle et constamment malade.
Zero ne réussit pas à passer à autre chose. La perte de sa famille constitue la pierre angulaire de son existence et symbolise sa haine des vampires : ces êtres monstrueux qui tuent simplement parce qu’ils en ont le pouvoir. De plus, comme expliqué plus haut, il a érigé comme raison de vivre la vengeance.
Pourtant, c’est au cœur d’une nuit particulière que Zero va faire face à une trahison qui le dépasse et qu’il n’aurait jamais imaginé : lors de son face à face avec Shizuka, à deux doigts de pouvoir satisfaire son objectif, apparaît celui qui n’était plus, Ichiru. Ainsi il était en vie.
Retrouvailles des jumeaux Kiryû.
Le coup de couteau dans le dos ne se fait pas attendre lors de ces retrouvailles : Zero comprend que son petit frère est à la solde de la sang-pur Shizuka Hiô, et pire qu’il l’a aidé à fomenter le meurtre de leur parents. Ichiru avait donc ouvert les portes de la maison familiale à la prédatrice.
L’impensable est donc en train de se produire pour le jeune homme qui reçoit une déclaration de haine fraternelle de la part de sa moitié. Comment se comporter et se relever après une telle découverte ? L’innommable vérité est pourtant limpide : celui qu’on adorait est celui qui a tout détruit.
Pourtant, au bout de cette nuit troublée, la conclusion est sans appel : Shizuka est morte de la plus étrange des manières et Ichiru est parti sans laisser de traces. Zero est alors considéré comme le meurtrier de la sang-pur et se retrouve accusé par le Sénat. Il semble n’avoir pas le choix d’accepter le sort qui lui est imposé, résigné.
Ce n’est qu’avec l’intervention de Kaname en faveur de sa cause, énième coup du sort à digérer, que Zero est libéré de tout soupçon. Malgré tout, sa raison de vivre vient de disparaître sans qu’il ait eu l’occasion d’y faire quelque chose : Shizuka Hiô n’est plus, laissant à Zero un vide amer qu’il faudra combler.
Désabusé, esseulé et en proie au doute, Zero veut en finir avec sa propre existence et attend le moment de grâce que son mentor semble décidé à lui accorder en l’exécutant. Pourtant, Yûki va lui sauver la vie en le protégeant de son corps refusant qu’il disparaisse.
Cette action va lui faire prendre soudainement conscience de sa bêtise puisqu’il subsiste entre eux leur promesse : Yûki devra abattre Zero si, et seulement si, celui-ci dégénère en Level E. C’est comme cela que Zero retrouve un peu foi en l’avenir en faisant le choix de laisser sa vie entre les mains de Yûki, celle qu’il estime et qui ne pourrait jamais le trahir.
Lorsqu’il retrouve une seconde fois Ichiru, ce dernier est en train d’agoniser. Tenant dans les bras ce petit frère qu’il aime tant et qu’il a maintes fois protégé, Zero vit les derniers instants de celui qui l’a trahi des années auparavant. Ichiru lui demande de boire son sang, qui contient celui de Shizuka, pour ralentir le processus de transformation et de continuer à vivre. Pour ma part, je trouve que c’est sur cet instant que Zero entame le deuil de ce qui a été et qu’il commence à pardonner ce qui aurait pu être…
Accepter l’inacceptable
La force de Zero réside, à mon sens, dans sa résilience et sa capacité à accepter ce qui lui semble inacceptable de prime abord. Le tournant majeur de son développement s’amorce lors de la découverte des origines de Yûki.
Pour le jeune homme, qui a été élevé dans une famille de chasseurs de vampires, la jeune fille devient instantanément une créature à éliminer et qui ne mérite pas son respect. D’autant plus que la haine de Zero pour les vampires se cristallise dans l’existence même du clan Kuran qu’il hait depuis le début.
Cette Yûki Cross qu’il connaissait depuis son enfance et qui a été pour lui un soutien et un pilier donne place à Yûki Kuran, héritière au sang le plus pur qu’il soit. Comment continuer à trouver du sens à son existence si la seule personne de confiance est en réalité une ennemie jurée ?
Pendant une très longue partie du manga, les deux jeunes gens ne font que se croiser : Zero ne peut pas supporter cette nouvelle Yûki et promet de la tuer si elle se trouve dans son champ de vision ; tandis que Yûki accepte à contrecœur de s’éloigner de lui pour l’apaiser. C’est toute la complexité du personnage de Zero : car comme le dit Yûki, il a besoin d’un ennemi pour vivre.
Se trouver une nouvelle raison de vivre.
La souffrance de Zero est à son paroxysme puisqu’il fait taire les sentiments amoureux qu’il porte à Yûki. C’est cette dualité entre dégoût profond et amour passionnel qui le brise et l’empêche d’avancer.
Incapable surtout de s’accepter, Zero fuit et trouve un exutoire dans son activité de chasseur de vampire. Pour combler ses instincts et oublier, il traque chaque nuit ce qui lui tombe sous la main et s’enivre de l’odeur du sang.
L’un des passages qui me serre le plus le cœur est celui des retrouvailles entre Yûki et Zero au cimetière. Ces deux derniers sont allés séparément sur la tombe de leur gouvernante d’enfance et Zero en profite également pour se rendre sur celle d’Ichiru.
Arrivé sur celle-ci, le jeune homme vit une discussion intérieure avec son frère. Ichiru lui explique son geste et fait amende honorable, lui déclare ses vrais sentiments et lui avoue qu’il restera toujours ce petit frère admiratif qui adorait Zero.
Je trouve qu’il s’agit d’une étape cruciale vers le chemin du pardon. Zero accepte finalement de se réconcilier avec ce frère qui n’est plus. Vraie délivrance, le jeune homme semble porter un poids en moins lorsqu’il croise la route de Yûki au cimetière.
La jeune fille est inconsciente puisqu’elle a subi une bévue de la part du sang-pur Lord Toma. Zero arrive sur la scène d’affrontement et décide de porter Yûki sur son épaule pour la ramener au QG des hunters, car les agissements de Kaname inquiètent la guilde qui souhaite avoir des informations. Et qui est mieux placé pour cela que la sœur et fiancée de Kuran ?
Malgré le sentiment de crispation qu’il a généré autour de Yûki et de sa nature de vampire, Zero ne peut se résoudre à la laisser seule. Tout son être est dirigé elle, vers cette envie de la retrouver malgré tout. En reprenant connaissance, Yûki se sent portée par une douce nostalgie, une odeur si proche et pourtant si lointaine qui lui donne envie de s’y blottir. C’est celle de Zero.
Sentir une odeur tant aimée…
Finalement, après multiples rebondissements, Yûki prend la décision d’effacer son existence de la mémoire de Zero : le jeune homme se morfond et souffre de la situation qui les sépare, et pour elle son bonheur passe avant tout.
Pourtant, après quelques entrevues avec cette vampiresse qu’il ne reconnait pas, Zero se rappelle. C’est à partir de ce moment, je pense, qu’il prend enfin conscience qu’il lui faut mettre de côté ses doutes existentiels pour protéger Yûki. Le manga s’achève sur le sacrifice de Kaname qui leur demande de vivre heureux et ensemble, car c’est ensemble qu’ils devraient être après tout.
C’est sûrement en partie grâce à cette déclaration finale que Zero comprend qu’il ne peut plus continuer à fuir la seule personne au monde qu’il souhaite avoir à ses côtés. Malgré les deux trahisons qu’il a vécues, il réussit à aller de l’avant en pardonnant le geste d’Ichiru et en lâchant prise sur la nature de vampire de Yûki, nature qu’elle n’a pas choisi. Comment pourrait-elle être coupable d’être ce qu’elle est ? Pourquoi continuer à le lui reprocher puisque sa seule crainte est de la perdre ?
Laisser de côté son égo et se lancer…
Pour moi, c’est ce que le personnage de Zero nous apprend dans Vampire Knight : la nécessité de s’accepter tel qu’on est, de saisir les petits moments de bonheur sans remettre continuellement tout en question. Pour pouvoir avancer vers de nouveaux crépuscules.
Zero est un personnage très complexe et très torturé mais c’est exactement le genre de personnage que j’aime ! <3
C'est LE personnage que je préfère dans Vampire Knight. Il a du parcourir un long chemin pour réussir à trouver la paix (et parfois je ne suis pas sûre qu'il l'ait vraiment trouvé) mais Yûki a le don de l'apaiser.
Mais concernant leur relation, j'ai toujours pensé que Yûki ne le méritait pas. C'est évident qu'elle ne l'a jamais aimé autant que lui il l'aime. Si Kaname n'était pas mort, et si Zero ne l'avait pas supplié de rester avec lui, elle ne l'aurait jamais choisi.
Aaaah Zero j’ai aussi un gros faible pour lui et c’est celui qui me fait ressentir le plus de choses. Je n’ai pas encore lu « Vampire Knight Memories » mais il me tarde pour, justement, savoir ce qu’il advient de la relation Yûki / Zero.
C’est vrai qu’on peut se demander quelle est l’intensité des sentiments de Yûki pour lui, et elle privilégie toujours sa relation avec Kaname. Néanmoins, pour sa décharge je pense que cela doit être difficile de jongler entre sa relation avec Zero et sa « destinée » révélée de princesse vampire (et donc son union quasi obligatoire avec Kaname)… Le débat est ouvert héhé ! Dans tous les cas, Zero reste un personnage marquant et vraiment touchant !